Lorsque Dream Theater est passé par Trondheim, Kim Arthur Sakariassen, coordinateur des fan clubs et John Raaness ont eu l’opportunité d’interviewer John Petrucci et John Myung pendant un long moment. Voilà donc l’interview qu’ils ont faite. Ils s’excusent d’avance pour la qualité du son : cela fut difficile pour eux de mixer le tout car il y avait des bruits de fond désagréables et les voix se noyaient dans tout ce brouhaha. Donc difficile pour eux d’obtenir une interview avec un son décent et qui ne fluctue pas. Cela donne quand même une interview décontractée avec les deux derniers membres d’origine. Vous retrouverez la vidéo originelle en fin d’article.
John Raaness: Cela fait déjà un mois que vous fêtez les 25 ans d’Images and Words
John Petrucci : Et oui..
JR : comment se passe la tournée?
JP : super bien?
JR : Vraiment?
JP : on prend beaucoup de plaisir. La première fois qu’on a annoncé à tout le monde qu’on allait faire cette tournée, c’était quasiment la fin de la tournée The Astonishing et on était bien conscient que 2017 allait être l’année du 25ème anniversaire donc on s’est dit « et si on faisait une tournée anniversaire ». On devait juste faire une petite tournée, mais les promoteurs du monde entier nous ont dit « vous devez venir là et là et là ». Même lorsque nous étions aux Etats Unis, on nous disait « vous allez faire cette tournée aux Etats Unis? ». Nous, on répondait un truc dans le genre « euh, sûrement? » Donc au final cette année sera dédiée à la tournée. On n’avait jamais prévu ça, on pensait avoir déjà tout prévu mais au final, cela va être une année intense pour nous niveau tournée.
JR : Que faites-vous lorsque vous répétez pour une tournée comme celle là, où vous rejouez un album que vous avez composé il y a 25 ans? C’est la même approche que pour n’importe quelle tournée?
John Myung : Oui c’est cette mentalité : on doit jouer beaucoup de morceau et voilà. Par contre, pour cette tournée, pas mal de ce que nous jouons a déjà été joué.
JP : c’est vrai.
JM : Nos mains et notre cerveau connaissent déjà les morceaux donc les rejouer était facile.
JP : J’ai été assez surpris lorsque j’ai réécouté les morceaux, du genre « oh, je jouais quoi là? » mais dès que j’ai commencé à répéter les morceaux, c’est revenu simplement. On a du jouer les morceaux d’Images and Words des milliers de fois, ça doit être pour ça.
JR : Une fois que vous avez décidé d’interpréter tout l’album, comment avez-vous choisi les autres chansons à incorporer dans la setlist?
JP : A Change of Seasons fut un choix facile puisque cette chanson devait théoriquement figurer sur Images and Words. Les gens ne savent pas forcément que lorsque nous sommes entrés en studio pour enregistrer cet album, cela devait être un double album et qu’à un certain moment de l’enregistrement, le label est venu nous dire « non, non, on ne va pas inclure cette chanson dans l’album ». Il était censé faire partie d’Images donc c’était logique de l’inclure en tant que rappel.
Et pour la première partie du set, on voulait faire la part belle à The Astonishing car c’est notre dernier album. Au départ, on avait inclus quatre morceaux, un peu comme une suite, mais on dépassait le timing donc on a dû réduire. On a voulu mettre deux chansons que nous n’avions pas jouées depuis un certain temps et un morceau que nous n’avions jamais interprété pour rendre ça toujours plus excitant. Nous n’avions pas trop de temps pour nous préparer car nous tournions toujours avec The Astonishing, et les fêtes de fin d’année approchaient donc certes, ça aurait été bien de faire telle ou telle chanson mais nous voulions plutôt jouer des morceaux que nous connaissions déjà. Mais même The Dark Eternal Night a représenté un défi. Par contre, des morceaux comme As I Am font partie de notre ADN donc on a décidé d’inclure des trucs dans ce genre.
JR s’adressant à John Myung : tu fais l’intro d’As I Am en solo avec un hommage à l’une de tes idoles. Pourquoi as-tu choisi cette chanson en particulier?
JM : L’idée vient de John : de rendre hommage à Jaco car l’intro d’As I Am est basée sur des harmoniques. J’ai donc écouté le morceau et j’ai senti une connexion. C’est simplement une idée de John qui s’est transformé en truc sympa.
JP : J’adore ce morceau. Je dois rendre à John ce qui est à John car avant de se quitter pour partir en vacances, je lui ai écrit un mail où je disais « on devrait rajouter pas mal de trucs différents pour rendre le premier set unique » et j’ai fait une liste du genre « on va faire ça, on va modifier Metropolis avec un solo de batterie » et nous sommes tous partis. Puis on s’est revu pour répéter. Nous répétions depuis seulement deux jours et John a dit « au fait, on fait comment pour l’intro et pour le truc de Metallica? » et je lui ai répondu « vache! Tu te rappelles de tout ça? ». D’ailleurs tu t’en rappelles (il s’adresse à John Myung).
JM : C’est vrai, c’est vrai
JP : Nous étions tous en train de galérer avec tous ces changements…
JM : en fait le mail avait été intercepté, il n’était pas perdu.
JP : c’est ça. Bref et John avait tout appris, même les changements et même cette section dans Metropolis où normalement la guitare et les claviers font un unisson mais nous avions décidé de faire un unisson pour tout le groupe. Et ça a dû être assez difficile à faire à la basse car c’est chaud à jouer. Enfin, pas pour toi…
JM : Non ce n’est pas super balèze à jouer
JP : ouais, bref, il l’avait appris et je lui ai dit « quoi tu l’as appris? Bordel, bon je suppose qu’on va finalement le faire… » c’était marrant.
JR : Pour vous, quel est le changement le plus significatif depuis 25 ans?
JP : Jordan et Mike (Mangini) ! C’est le plus gros changement. Deux membres qui n’étaient pas là il y a 25 ans.
JR : Enfin je veux dire, la façon dont le groupe est géré, la façon dont vous travaillez au sein du groupe, la gestion…
JP : Ah ça, nous sommes plus professionnels. Lorsque nous avons démarré, nous n’avions jamais fait de tournée avant Images… Nous conduisions nous mêmes un van et nous n’avions aucune expérience. Donc nous sommes bien plus des professionnels à présent, je pense. Nous avons plus d’expérience sur comment créer un spectacle, comment organiser une tournée, comment voyager, sur notre matériel, la production, les lumières…
JM : tout à fait : pour moi ce qui a changé c’est mon expérience. C’est génial de repenser à cette époque car tout était puissant, beaucoup de choses se tramaient. Et puis la musique défie le temps donc on aime toujours autant jouer cet album.
JP : c’est vrai
JM : je pense que c’est génial lorsqu’on réussit à faire ça : prendre part à un projet dont on ne se lasse jamais. C’est chouette lorsque ça vous arrive.
JR : Arrivez-vous à savoir, lorsque vous écrivez des chansons, lorsque vous composez des albums, quels morceaux seront les plus appréciés car Pull Me Under était un peu une surprise non? Ce n’était pas vraiment celui que vous voyiez comme un hit et pourtant c’est devenu un vrai succès. Pensez-vous que vous êtes plus capables de prédire ce genre de succès maintenant?
JP : Aucune idée.
JR : Ou c’est la même chose qu’il y a 25 ans?
JP : Pour être honnête, c’est la même chose. Parfois, on est tous super excités pour un morceau « les gars, ce morceau est énorme! » et puis aucune réaction. Donc je pense que c’est dangereux de courir après le succès. Lorsque nous avons composé Images and Words, nous n’avions pas en tête d’écrire des singles car nous n’avions pas ce genre de succès. C’est pour cette raison que les morceaux n’ont pas d’arrière pensée. Il ne faut pas qu’on rentre dans ce système, de se dire « on va écrire ça et si ça se trouve, on passera à la radio », ce n’est pas la bonne voix. On veut juste écrire ce qui nous vient naturellement, ce qu’on trouve bien et ce qui sonne bien et on croise les doigts…
JR : Quelle approche privilégiez-vous lorsque vous composez un nouvel album? Avez-vous un certain cadre que vous utilisez en termes de style ou de direction, comme par exemple Octavarium qui incluait un énorme concept, ou Scenes from a Memory ou bien sûr the Astonishing? Est-ce que vous vous posez et parlez de cela avant d’improviser ou …
JP : C’est ce qu’on fait, lorsque je pense à tous les albums, ils avaient tous une certaine démarche. Même si ce n’est pas précis, ça reste une démarche globale. Par exemple, pour Train of Thought, on voulait faire quelque chose de puissant. On voulait que dès le début de chaque chanson, le public soit au taquet…Et pour qu’on se rappelle de cette démarche, on l’a même écrite à un endroit, lorsque nous répétions. Scenes était un concept album donc on devait suivre l’histoire, créer des thèmes… En fait, ça dépend de l’album.
JR : Quel est votre plus gros défi, lorsque vous êtes en tournée? Je parle pour vous, personnellement.
JM : Rester en bonne santé, ne pas tomber malade, c’est ça le plus gros défi. Car c’est assez facile d’attraper un microbe et ça vous pourrit la tournée. Donc c’est le plus gros défi, ainsi que de me reposer suffisamment.
JP : Pour moi, c’est clairement le fait d’être loin de chez moi. Ca a toujours été le plus difficile. On est tous mariés depuis tellement d’années et nous sommes pères de famille. Nos enfants ont bien grandis à présent et sont des adultes. Mais ça a toujours été difficile d’être un mari et un père alors que je suis loin d’eux pendant longtemps : quatre, cinq semaines…
JR : Est-ce que vous vous arrangez pour planifier les choses en fonction de votre famille, de vos enfants?
JP : On essaye mais parfois ça ne marche pas, mais on essaye quand même. On essaye d’être rentrés chez nous pour les vacances pour lorsque les gens nous le demandent spécifiquement, pour des occasions spéciales comme les grosses fêtes de famille ou les temps forts d’une famille.
JR : Est-ce la même chose qu’il y a 25 ans?
JP : Bin, on faisait des tournées quoi qu’il arrive…
JM : En fait la tournée Images and Words était une exception… Je me rappelle qu’on a passé certaines fêtes dans des lieux variés.
JP : Exact, je me rappelle qu’on a fêté Thanksgiving à l’arrière d’un semi…Mais on ne fait plus de trucs dans ce genre à présent.
JM : Je pense que depuis, on a mis un point d’honneur à être présents pour les fêtes de fin d’année et les gros événements familiaux.
JP : On essaye de s’accorder du temps entre deux tournées. Donc on ne tourne pas des mois d’affilé.
JR : Aujourd’hui, en 2017, Dream Theater a un énorme catalogue de chansons et de hits. De plus vous rejouez intégralement Images and Words donc je me demandais ce que serait le futur de Dream Theater. Et je vois deux possibilités : faire comme cette tournée et vous focaliser sur les plus grands succès et l’autre serait de continuer comme vous faites actuellement : « composer, tourner, composer, tourner, composer, tourner… ». Qu’envisagez-vous pour le futur de Dream Theater pour les années à venir?
JM : Tout simplement de continuer à composer. La musique évolue. Je veux juste continuer à composer et à faire ce que nous faisons et faire parti de quelque chose de plus grand. On veut vraiment poursuivre dans cette voie. La plus belle chose, lorsqu’on est dans ce groupe, c’est qu’on peut faire ce qu’on veut mais continuer à le faire avec l’expérience en plus. C’est notre carburant. On veut réaffirme ce qu’on a fait, ce qu’on est capable de faire et aller de l’avant en affrontant les difficultés.
JR : Je connais le groupe depuis des années et j’ai l’impression que la force de Dream Theater est cette capacité à créer de nouvelles choses, aller de l’avant et composer de nouveaux morceaux…mais le temps passant, n’est-ce pas difficile de revenir sur des terres que vous avez déjà foulées? N’est-ce pas difficile de trouver de nouveaux éléments? C’est quelque chose qui vous vient naturellement ou parfois vous devez vous dire « attendez, on a déjà fait ce genre de truc »?
JP : Parfois ça arrive mais je pense qu’en général, chaque membre du groupe adore jouer de son instrument, être ensemble et créer. Je ne pense pas qu’on perdra cet état d’esprit un jour. Grâce à ça, lorsqu’on se retrouve, on compose et la magie opère et on a des idées pour des journées entières. Mais parfois, c’est vrai qu’on se dit « tiens on a déjà fait ce genre de truc ». Donc on fait attention. D’un autre côté, on adore jouer en live tout simplement. Nous sommes des musiciens qui aimons essayer de recréer ce qu’on a fait en studio, mais devant un public. On sait à quel point la musique en live est puissante et que le public adore venir nous voir et nous entendre jouer. On aime aussi aller à des concerts. Ce sont les deux aspects de la musique et même si ça pourrait sembler trivial, ce qui nous pousse, c’est de faire ce qu’on aime. En plus, on adore être ensemble donc c’est que du bonheur.
JR : Lorsque vous composez votre musique et que vous l’enregistrez, est-ce que vous vous dites « comment va-t-on faire ça en live? » ou alors est-ce que parfois vous pensez « on arrivera jamais à jouer ce truc »
JP : Oh que oui, bien souvent. Mais c’est comme ça qu’on s’améliore, plusieurs musiciens me l’ont dit. Parfois tu sors un truc de fou et tu te dis « comment je vais pouvoir rejouer ça » et tu le refais. Tu trouves une façon pour le faire et c’est comme ça que tu t’améliores.
JM : Oui et entre John, Jordan, James, Mike et moi-même, on peut faire pas mal de trucs avec les nouvelles technologies.
JR : N’est-ce pas facile de se laisser tenter par les nouvelles technologies et leur faire accomplir le travail?
Rires
JM : Euh… (John esquisse un petit sourire narquois)
JP : Non puisqu’on adore jouer.
JR : On est d’accord mais quand même non?
JP : Oui on pourrait engager des musiciens en plus pour jouer. C’est quelque chose qu’on fait lorsqu’on sent que c’est approprié. Par exemple pour The Astonishing, il y avait un orchestre sur tout l’album : un orchestre complet, un vrai chœur. Comment on aurait pu recréer cela réellement en live sans impliquer un vrai orchestre, faire péter nos comptes en banque et vendre nos maisons. Hors de question! Donc on a utilisé les enregistrements en play back, avec les projections vidéo : c’est pour nous un bon exemple de comment on peut utiliser la technologie pour améliorer le show tout en jouant nous même en live.
Kim Arthur Sakariassen : Vous vous intéressez aux fans sur internet, aux memes et les trucs dans le genre?
JP : Parfois, mais pas toujours. C’est un truc bizarre car, comme tout artiste publique, il faut faire attention avec ce genre de choses car si tu lis trop de trucs dans ce genre, si tu lis trop régulièrement les commentaires, ça va te pourrir le cerveau. Personnellement, j’essaye de ne pas m’en préoccuper mais parfois des choses s’affichent sans que tu ne le veuilles. Mais il y a beaucoup de trucs marrants et cool et les fans passent beaucoup de temps à poster des trucs et parfois je me dis « tiens c’est vraiment bien! »
JM : Pas mal de trucs sont biens lorsqu’ils arrivent à nous. Mais personnellement, je n’ai pas besoin de ce genre de chose. Je trouve ça inutile. Si c’était utile, je passerais beaucoup de temps là dessus mais je passe mon temps à rester en bonne santé, à ce que mes doigts jouent proprement, à m’entraîner, à m’échauffer… Ce sont les choses les plus importantes pour moi. M’intéresser aux différentes opinions et aux autres trucs… je serais sûrement plus ouvert à ce genre de choses si je trouvais ça utile.
KAS : Surtout que les fans de Dream Theater sont parmi les plus critiques
JP : Ça c’est sûr, mais comme je l’ai déjà dit, cela veut aussi dire que les gens écoutent avec attention. Et cela veut dire beaucoup pour nous, car on est hyper précis et carrés dans la musique qu’on compose. Ca me fait penser à un truc marrant : lors d’une date il y a quelques semaines, il y a un truc qui s’est passé avec ma guitare et je n’ai pas pu jouer une partie en guitare claire et un mec m’a dit « Hey, tu n’as pas joué cette partie » et je lui ai répondu : « ouah je ne pensais pas que quelqu’un s’en apercevrait! », mais c’était marrant. Pour moi, en tant que guitariste et comme je me préoccupe de ma carrière, les forums, les réseaux sociaux permettent d’attendre les fans assez rapidement. Je peux diffuser des news et des informations. J’ai d’autres projets comme mon camp de guitare, les meet and greets et mes nouveaux instruments signatures… C’est un super outil pour dire aux gens ce que je fais et pour atteindre des centaines de milliers et des millions de gens assez rapidement au sein d’une même communauté. C’est donc un outil absolument génial et incroyable. Mais si tu es une personne fragile qui n’accepte aucune critique, alors lire des tonnes de commentaires n’est probablement pas une bonne idée.
JR : Est-ce que vous pensez parfois que vous êtes un modèle pour des milliers de musiciens? Et comment vous devez vous comporter et ce que vous devez dire?
JP : Bien sûr
JM : C’est quelque chose qui vient naturellement lorsqu’on fait carrière et que les choses évoluent. Les gens nous découvrent en nous écoutant et on était comme eux : on a grandit en écoutant de la musique et en aimant certains groupes donc c’est naturel de laisser ces choses influencer ta vie.
JP : On comprend comment les gens fonctionnent, lorsque tu admires quelqu’un, il peut avoir une influence sur toi. Nous aussi on a grandit en suivant certains musiciens qui eux-mêmes avaient été influencés. Et parmi ceux-là, il y a en a que tu respectes énormément à cause de leur façon de vivre, de leur éthique ou d’autre chose…Donc on est conscient qu’on peut avoir la même influence, qu’elle soit bonne ou mauvaise sur les gens. Donc on n’a pas envie de sortir et d’être un mauvais exemple pour les gens. De toute façon, ça ne fait pas parti de notre état d’esprit. De toute façon, vous savez qui on est, si vous nous suivez depuis longtemps.
KAS : Absolument
JP : On reste les mêmes : chez nous, à la maison…
KAS : Tu as maintenant ton propre stage de musique, c’est quelque chose qui te faisait envie? D’enseigner aux gens?
JP : Oui, avec John Myung, on est allé à Berklee, on vient d’un milieu où on a appris la musique, où on était des musiciens qui étudiaient la musique et qui aiment toujours apprendre. J’ai fait des master class, des clincs et d’autres trucs mais je n’avais jamais fait de stage. Ce sera donc mon premier en Août. Et j’ai vraiment hâte car les gens ne viendront pas seulement pour jouer pendant 4 jours de la guitare mais les professeurs qui interviendront font parti des meilleurs guitaristes au monde. On va avoir
Mac Alpine, Andy McKee, Andy James, Tocsin Abase, Jason Richardson et Devin Townsend. A chaque fois que je prononce ces noms, on me dit « mais ils vont tous être réunis au même endroit? » On va enseigner, on va improviser, ça va être génial.
KAS : Il y aura des concerts le soir?
JP : Oui on fera des concerts le soir, des barbecue, on traînera ensemble. Ca se passera à Long Island, dans la ville où on a enregistré pas mal de trucs, plus précisément à Glen Cove, un endroit de Long Island que je connais bien. C’est magnifique l’été, ça va être génial.
KAS : (s’adressant à John Myung) et toi, tu as fais une vidéo pédagogique il y a très très longtemps, tu as déjà pensé en refaire une?
JM : Non je n’y ai jamais vraiment pensé. Pour moi, il suffit juste de rester créatif et d’apprendre encore plus sur ce que je fais car on peut toujours apprendre : un logiciel c’est comme un nouvel instrument, pareil pour les enregistrements et il y a tellement de choses que j’essaye de faire ou que je veux acquérir. De plus, faire parti du groupe et faire ce que nous faisons, ça reste un travail à plein temps donc c’est difficile de faire plus que ce qu’on fait déjà, ça nous bouffe chaque minute de notre temps…
JR : Quel genre de musique, que tu écoutes, pourrais t’aider à créer?
JM : Tout ce qui provoque une émotion. J’essaye d’écouter des choses qui sortent du type de musique que j’écoute habituellement et je découvre de nouvelles choses. J’essaye d’intégrer ces choses dans mes compositions futures. Je commence par digérer les choses qui me touchent et celles que je trouve profondes et j’essaye de trouver un moment pour intégrer ça au sein du groupe. C’est que qui nous rend unique, c’est ce qui fait l’essence du groupe. C’est le genre de groupe que j’aime : lorsque les membres arrivent à ce genre d’alchimie, qu’ils trouvent un terrain d’entente et qu’ils composent autour.
JR : Dans la musique d’aujourd’hui, qu’est ce qui vous impressionne ou qui vous fait dire « ouah c’est vraiment dément »? Y-a-t-il une technique, une qualité ou un type d’écriture particulier?
JP : Tout ça en fait, ça dépend. Beaucoup d’entre nous sont encore impressionnés par certains musiciens qui ont une technique de folie, du genre « oh bordel, comment ce gars arrive à jouer ça? » Et bien sûr, si cette technique est cohérente dans ce qu’ils proposent musicalement, c’est encore mieux et, là, ça attire réellement notre attention. Mais parfois, comme le dit John, cela peut être la moindre petite chose. Ca peut nous marquer quelque soit le type de musique. Peut importe où l’on soit et où on entend un truc, si ça nous émeut et ça nous marque, alors c’est parti. C’est comme ça que ça se passe. Ca peut venir des paroles de la production, de comment ça sonne ou parfois on écoute un truc et on se dit « ouah ça rend vachement bien, qui a produit cet album? Qui l’a mixé? ». Et bien sûr comme je l’ai déjà dit, les trucs techniques ça nous parle. Comme on s’entraîne sur nos instruments, dès qu’on entend un musicien taré, ça nous donne envie d’en savoir plus…
JR : Est-ce justement quelque chose que vous essayez de mettre dans chaque album : cette folie, ces unissons hyper rapides… Est-ce quelque chose que vous vous devez de mettre dans un album de Dream Theater.
JP : Je pense que c’est normal. Ca fait parti de ce que nous sommes. Parfois on a envie de le faire mais de toute façon, je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas car à chaque fois qu’on se retrouve, on en vient à faire des choses barrées sous une forme ou une autre.
JR : C’est bon à entendre!
JP : Oui c’est juste du fun, que du fun.
JR : Pour moi, ce qui rend Dream Theater unique c’est que pendant une minute, vous êtes capable de jouer un truc qui va vous scotcher sur place et juste après, vous jouez quelque chose qui nous permet de fermer les yeux et de s’évader.
JP : Merci, ça fait plaisir!
JR : C’est vraiment unique dans ce groupe.
JP : Merci, ça me touche vraiment. En ce qui concerne ce deux éléments, on fait toujours des trucs de folie qui sont marrants à jouer et à écouter. D’ailleurs j’adore écouter ce genre de trucs. Mais il y a cet autre aspect important qui consiste à faire des choses mélodiques, atmosphériques et à composer réellement. Tout ça est réellement important. Quand on écoute de la musique, on veut avoir des frissons peut importe si ce sont des choses simples ou compliquées, ces instants sont tellement uniques. Donc on essaye de recréer ce genre d’émotion. Ce qui fait que les chansons, les albums et les concerts sont plus intéressants, c’est la combinaison de ces deux éléments. Si on s’entêtait à faire uniquement un déluge de notes, on s’ennuierait sûrement. Et d’un autre côté, si on ne faisait que des choses atmosphériques pour s’évader, on tomberait de sommeil. Donc on aime bien combiner les deux.
JR : Avez-vous vu un changement parmi vos fans? Ou est-ce que ça va des plus jeunes ou plus vieux? Ou alors y’a-t-il eu un changement significatif au cours des dernières années?
JP : En fait, on a plus de fans norvégiens (rires) qu’avant, c’est hallucinant!!
JM : En fait les gens qui ont grandit avec nous ont initié leurs enfants aussi. C’est ce qui se passe lorsqu’une nouvelle génération de fans se crée et ils viennent aussi aux concerts. Donc on a tout type de personnes : des enfants aux adultes.
JP : C’est assez variés. On a plus un équilibre entre les hommes et les femmes alors qu’avant, lorsqu’on a commencé ce métier, c’était plus des hommes. Et comme la dit John, on a de jeunes enfants et des personnes plus vieilles. On ne sait jamais à quoi ressemble le fan typique de Dream Theater, l’habit ne fait pas le moine.
JR : Ca doit être génial pour un artiste de pouvoir toucher tout type de personnes.
JP : C’est vraiment chouette.
JR : Car certains artistes, de nos jours, ont un public restreint qui va de 19 à 23 ans par exemple mais vous, vous avez un public varié, ça va des jeunes aux plus vieux, des garçons aux filles…tout le monde en fait.
Ressentez-vous une différence lors des interactions avec le public selon le pays? Ou selon les continents?
JP : Ca dépend mais je dirais que oui…
JM : Par exemple, les italiens ont beaucoup d’énergie et donnent beaucoup d’émotion… par contre dans certains pays, ils sont plus réservés et observateurs. Donc l’énergie projetée est sûrement ce qui fait la différence : qu’ils soient juste assis à observer ou qu’ils participent activement en chantant et en bougeant.
K : Comment gérez-vous cette différence de dynamique?
JM : On reste concentré et on essaye de ne pas se laisser distraire.
K : Ca doit être assez difficile de jouer un soir face à un public déchainé et le lendemain d’être face à un public qui ne fait que de vous fixer.
JP : C’est vrai, mais il faut le prendre comme ça vient. Comme l’a dit John, on joue et on aime jouer, donc on essaye de jouer du mieux qu’on peu, peu importe le public. Cela dit, c’est clair que lorsqu’on reçoit plus d’énergie de la part du public, on le sent, ça nous booste. Mais on s’est rendu compte que même si les gens sont plus passifs, ils ont quand même acheté un billet pour nous voir. On est conscient qu’ils sont là car ils le veulent. Donc on ne s’en préoccupe pas trop.
JM : Bien sûr, chacun a sa façon se d’exprimer. Ca ne signifie rien de plus. On n’est pas contrarié, c’est juste un moyen pour eux de nous montrer du respect. Ils ne veulent pas perturber la prestation de James et…
JP : Si on nous lançait des tomates alors ça serait différent. Mais les gens sont contents de venir nous voir…
JR : Puisque tu parles de James, il parle un peu plus entre les morceaux, ce qui me manquait depuis quelques temps, et je trouve ça génial. C’est quelque chose dont vous avez parlé?
JP : Oui, j’ai eu une conversation avec lui et on était un peu nostalgique de faire une tournée comme celle là, car Images and Words, même si c’est notre deuxième album, reste pour beaucoup de fans, le premier album qu’ils ont écouté. C’est avec ça qu’ils ont découvert Dream Theater. Il y a certains fans qui nous suivent depuis la sortie de l’album. On avait envie de créer une atmosphère où l’on pourrait raconter des histoires et j’adore ce que James fait et je lui dis chaque soir. C’est vraiment un moment unique pendant le concert car il partage des anecdotes que peu de gens connaissent, sauf nous bien sûr, et cela prouve à quel point l’album et cette période de nos vies, compte. J’adore vraiment ce qu’il fait, c’est très divertissant.
JR : Et ça vous rapproche de votre public également.
JP : Bien sûr, c’est bien plus personnel.
JR : Ca me rappelle la série créée par MTV où ils racontaient des anecdotes, c’est vraiment hyper intéressant car vous racontez des choses qu’on ne connait pas, des trucs marrants qui se sont passés pendant l’enregistrement ou la tournée.
JP : Ce sont les coulisses, un peu comme lorsqu’on raconte une histoire lors d’un dîner du genre « tu te rappelles quand on a fait ça… ». Sauf qu’il le fait devant le public. Mais cela rend les choses plus intimes et nous rapproche du public.
K : Et puis il est marrant…
JP : Il est vraiment marrant, voir taré…
JR : Qu’est-ce qui est prévu pour le reste de l’année?
JM : On continue…
JR : Continue de tourner?
JP : C’est une grosse tournée oui!
JM : Continuer les concerts et apprécier cela.
JP : On pensait s’arrêter là comme je l’ai dit mais on a un deuxième leg en Avril et en Mai. Puis on va s’arrêter pendant l’été, moi j’ai mon stage en Août puis on recommencera en Septembre en Asie, puis aux Etats Unis car dès qu’on a annoncé la première tournée européenne, les fans américains nous ont dit « vous devez venir chez nous! ». Donc on fera ça eu Automne, ce qui nous amène aux fêtes de fin d’année puis probablement, on retournera en studio pour le prochain album. Mais pas avant le début de l’année prochaine.
JR : Cool !
JP : Ouais!
K : Bon je pense qu’on a fait le tour de la question.
JP : Super, vous avez fait du bon travail les gars! Merci!
K : Merci à vous.
JP : Non vraiment merci à vous les gars pour ceux que vous faites, ça fait longtemps…
JR : C’est notre passion…
JP : Ca fait longtemps qu’on se connaît et c’est vraiment quelque chose d’être ici.
JR : C’est vrai, jamais je n’aurais pensé que vous pourriez venir dans cette ville.
JP : C’est fou.
JR : Tout le monde vient à Oslo, la grande ville. Il y a des salles plus grandes. Mais dès que la date à Trondheim a été annoncée et que les tickets ont été dispo, le concert a été complet très rapidement.
JP : C’est chouette et on apprécie vraiment ce que vous faites, surtout Kim car on ne t’a pas engagé. Tu fais ça uniquement parce que tu aimes le faire et tu nous rends un énorme service car tu rassemble toute la communauté de fans. Donc bravo!
K : Merci
JP : On apprécie réellement. C’est chouette car personne dans le groupe ne fait ça alors je voulais que tu saches à quel point on appréciait cela.
K : Merci
JR : Et il semble de que le format que Kim a mis en place (rassembler plusieurs franchises sous une même bannière) marche, vous verriez le nombre de communautés de fans qui existent.
K : qui se créent…
JR : où qui se font connaître en disant « on est là, ça fait longtemps qu’on est là »
JP : C’est génial. On ne le dit pas assez mais ça nous touche vraiment car on ne s’en occupe pas personnellement. On se concentre sur le fait d’écrire et de jouer et personne dans notre organisation ne s’en occupe donc tu es un peu une extension de notre groupe. C’est génial.
JM : Et ça n’a pas de prix. Je pense que cette expérience m’a appris que c’est génial d’avoir une bonne équipe quand le groupe devient célèbre. C’est ce qui nous aide.
JP : Effectivement.
JM : Je dirais que plusieurs cerveaux valent mieux qu’un seul, plus on est à réfléchir, plus on peut avoir d’idées et d’énergie. C’est génial d’avoir assez d’espace pour se focaliser sur une chose et d’y réfléchir.
JP : Et c’est vraiment important pour nous car on n’est pas diffusé à la radio, on n’est pas connu du grand public donc la communauté de fans est certes puissante et large mais le fait de pouvoir les regrouper et de communiquer avec eux, c’est génial.
JR : Ca me fait toujours halluciner de voir à quelle vitesse les fans reprennent vos nouvelles chansons dès qu’un album sort.
JP : Ouais c’est incroyable.
JR : La dernière fois, ça n’a même pas duré un jour!
JP : Incroyable ouais!
JR : Et en plus la reprise était bien.
JP : Oui elle était bien! On trouve des gens talentueux de partout.
Traduction : The Keyboard Wizard